Les chauves-souris, ces petits mammifères qui nous mettent à l'épreuve
Les chauves-souris sont les seuls mammifères capables de vol actif. À cette particularité s’ajoute celle de l’écholocation, qui consiste en l’émission d’ultrasons, permettant aux chauves-souris de cartographier l’espace autour d’elles. Cela leur permet de se déplacer dans l’obscurité, mais également d’y chasser. Ces ultrasons sont inaudibles pour l’être humain, ainsi alors que les chauves-souris évoluent dans leur environnement, nous ne pouvons pas les voir ni les entendre, ce qui les rend particulièrement complexes à étudier.
Mais le défi ne s’arrête pas là. Bien que ne pesant parfois que quelques grammes, les chauves-souris sont pour certaines capables de migrer sur des centaines de kilomètres. Elles changent de gîte à chaque saison, afin de trouver les conditions optimales pour hiberner, chasser, mettre bas et élever leur jeune ou se reproduire. Ainsi, alors que les conditions optimales pour une hibernation réussie sont une température très fraîche, stable et un degré d’humidité élevé, les conditions pour l’élevage des jeunes seront au contraire une température élevée et la disponibilité d’un territoire de chasse riche en proie à proximité.
Nous sommes ainsi aveugles et sourds face à ces petites créatures en constant et rapide déplacement.
Différentes techniques ont donc été élaborées pour nous permettre de les voir, les entendre et les suivre. Cela afin de pouvoir les étudier et mieux les protéger, les populations de ces petits animaux étant en déclin à travers l’Europe.
PERCEVOIR
LES CHAUVES-SOURIS
Caméra thermique
Cette technique permet de visualiser l’environnement et les organismes vivants par leur émission de chaleur. Elle est donc particulièrement adaptée aux chauves-souris, que ce soit pour observer leurs comportement pendant leurs sorties de gîte sans les perturber ou pour étudier leurs routes de vol.
Suivi vidéo
Utilisé principalement pour les gîtes de mise-bas. L’installation d’une caméra à vision IR permet de suivre l’évolution de la colonie sans générer de dérangement. Cela permets de connaître les périodes importantes telles que celle de l’arrivée des femelles, les premières naissances, le départ de la colonie, mais aussi tous les potentiels dérangements.
Jumelles infrarouge
Généralement utilisées en simultané avec un Pettersson (écoute active). Elles permettent de voir dans l’obscurité en éclairant avec des LED infrarouges (IR), ce qui perturbe moins les chauves-souris qu’un éclairage blanc, jaune ou rouge.
Ecoute active
Cette technique, aussi appelé « hétérodyne », permet de restituer mécaniquement les ultra-sons émis par les chauves-souris afin de les rendre audibles à nos oreilles. Équipé d’un Pettersson et d’écouteurs, nous pouvons maintenant les entendre et même les comprendre. En fonction des espèces, la sonorité varie et en fonction de leur comportement, l’intensité et la régularité change. Grâce à une multitude de critères, nous pouvons identifier une partie des espèces présentes.
Cette méthode est souvent utilisée pour identifier les chauves-souris en sortie de gîte, ou pour réaliser des inventaires en milieux naturel ou artificiel.
Ecoute passive
L’écoute passive est une technique qui consiste à enregistrer automatiquement pendant toute une nuit les ultra-sons émis par les chauves-souris. Les enregistreurs automatiques sont réglés pour se déclencher lorsque des ultra-sons sont captés par le microphone.
Nous installons ces appareils dans différents milieux afin de capter le plus de diversité possible. Pour choisir leur emplacement, nous essayons de rentrer dans la tête d’une chauve-souris :
- Où passer ?
- Où aller chasser ?
- Où aller boire ?
De cette façon, nous augmentons nos chances de capter différentes espèces.
Ensuite, nous décortiquons les sons et nous pouvons identifier la quasi-totalité des espèces de Chiroptères qui sont passées à proximité de l’enregistreur. Cette technique demande plusieurs années d’expérience et une bonne maîtrise de l’écologie des chauves-souris.
RECHERCHER
DES GITES A CHAUVES-SOURIS
Recherche de gîtes en bâtis et ouvrage d’art
La recherche de ce type de gîte se fait, le plus souvent, lorsque nous lançons une opération (de petite ou grosse ampleur) afin de prospecter les bâtiments et ouvrages d’art d’un secteur. Armés de patience, de personnes motivées et de lampes, nous arpentons de grandes distances pour trouver des chauves-souris.
Cavités
Une grande partie des chauves-souris française utilisent les cavités naturelles et artificielles dans leur cycle biologique. Torche à la main, frontale sur le casque et harnachés d’un équipement spéléologique, nous prospectons le plus discrètement possible les galeries pour compter et identifier les chauves-souris présentes. Cette technique permet de pouvoir suivre de manière précise et régulière les effectifs de nombreuses colonies en PACA.
Falaises
La prospection en falaise consiste à observer depuis le sol avec des jumelles et une puissante lampe torche (ou un miroir) toutes les anfractuosités dans lesquelles des chauves-souris pourraient se loger.
Il est très délicat d’observer tous les recoins dans lesquelles elles peuvent s’abriter. Il est donc préférable d’associer cette recherche avec une écoute active le soir venu. Une prospection sur corde est également parfois nécessaire afin de pouvoir préciser les enjeux.
Gîtes forestiers
Les gîtes présents dans les arbres sont souvent les plus méconnus. Différents types de cavités peuvent offrir un gîte adéquat aux chauves-souris. Cela peut-être des trous de pic, une écorce décollée, un trou formé naturellement, une branche cassée, etc.
Il est difficile de les observer car les cavités peuvent facilement être dissimulées derrière une branche ou des feuilles. Avec un œil affuté nous arrivons à déceler le potentiel de certain arbres. Les prospections peuvent également se faire sur corde si la morphologie de l’arbre le permet et un endoscope peut-être utilisé pour confirmer l’intérêt de certains arbres et la présence de chauves-souris.
SUIVRE ET ETUDIER
LES CHAUVES-SOURIS
Notre présence prolongée dans un gîte peut provoquer de gros dérangement pour les chauves-souris. Nous choisissons donc toujours la méthode qui provoque le moins de nuisance pour les colonies. Plusieurs techniques sont employées :
- Comptage en sortie de gîte,
- Photographie des individus,
- Comptage sur place.
Cependant, dans certains cas spécifiques, des méthodes plus invasives sont nécessaires.
Capture
Les Chiroptères en France métropolitaine sont tous protégés par la loi. Il faut donc être détenteur d’une autorisation spécifique pour pratiquer ce type de manipulation. La capture de chauves-souris demande de nombreuses années d’expériences et de savoir-faire.
Plusieurs techniques de capture existent, mais la plus répandue consiste à tendre un filet en travers des routes de vols utilisées par les chauves-souris.
Postés à quelques dizaines de mètres, nous attendons 10 à 15 min avant de relever les filets. Après quelques mesures biométriques et une observation de l’état physiologique, nous relâchons les individus.
Télémétrie
Après avoir équipé une chauve-souris d’un émetteur d’ondes radio hautes fréquences, nous pouvons la détecter sur de grandes distances.
Armés d’antennes et d’une équipe motivée, nous avons la capacité de localiser les individus par triangulation.
Cette technique est utilisée dans deux cas différents :
- La recherche des gîtes,
- La recherche des territoires de chasse.
Transpondage
Cette méthode, consiste à pucer des individus. Ces puces se lisent avec un champ électromagnétique (puces similaires à celles qui sont mises aux animaux domestiques).
De cette façon, nous avons la possibilité d’identifier précisément des individus et de connaître leurs déplacements et donc la fréquentation de certains sites.